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 tristan b. • vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu

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Tristan A. Lysander
tristan b. • vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu Rangadulte
Tristan A. Lysander

Messages : 57
Date d'inscription : 11/08/2012
Age : 31


It's a kind of magic.
Age du personnage : trente-quatre ans
Nationalité: russe
Relationship:

tristan b. • vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu Vide
MessageSujet: tristan b. • vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu   tristan b. • vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu Icon_minitimeDim 28 Oct - 22:40

tristan b. • vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu Tumblr_m9x1ppDwqI1rdnuqio1_500



ô ma folie mon beau flacon, donne-moi d'étranges poisons. j'en ai assez du Postillon et des litrons et des graillons et des serveuses de café qui attendent d'être mangées.


Tristan n’aimait pas la mer.
Son esprit cartésien ne voyait dans les embruns qu’une vaste étendue d’eau salée que les touristes débonnaires prenaient pour un urinoir et les poissons pour baisodrôme géant. La mer ne lui inspirait rien, pas plus que des poèmes lyriques que le sentiment d’être en vie, le visage frais claqué par la bruine fine. C’était d’un emmerdement infini, il n’y avait pas de transcendance dans le claquement des vagues, les algues séchées qui collent à la peau et les grains de sable perdus au fond d’une culotte de bain. Pourquoi tant de photographies, dauphins qui jaillissent de l’eau, pourquoi tant de cartes postales, soleil couchant dans le lit de Poséidon, pourquoi tant de romantisme, balade à cheval sur le sable ? Elle ne comprenait pas, aussi peu fut-elle intéressée par la vénusté d’un instant. C’était pourtant une dame pleine de fantasmes.

Elle se souvenait avoir un jour aimé la mer, oui, affalée sur la banquette arrière d'une vieille jeep au petit matin, et des lunettes aux montures écarlates remontées sur l'arête de son nez grossier pour cacher les affreuses cernes que sa nuit blanche avait peintes en violet de ses doigts délicats au parfum alcoolisé. Elle devait avoir quelque chose comme dix-neuf ans et quelques mois. Si elle se rappelait bien - et sa mémoire lui faisait rarement défaut -, il y avait Konstantin au volant, Valentina et ses boucles créoles qui lui allaient si mal blotties contre son ventre qui n'hébergeait pas encore un ridicule embryon, et Orest vivotant sur le siège avant, encore tous sonnés de leur folle soirée. Ô comme cela lui semblait si lointain ! la plage embrumée  d'Arkhangelsk, l'écho du souffle rauque d'Orest dans ses oreilles, la morsure glacée de la grande et belle Sibérie sur ses joues rouges, la petite main chaude de Valentina posée contre sa poitrine, les grésillements de la vieille autoradio, les sifflotements de Konstantin, et tout ça, tout ça, qui s'ajoutait à la longue liste des choses qu'elle finirait un jour par oublier, ces tableaux qu'elle ne pourra plus emmener avec elle, emmitouflés dans le voile opaque de ses nuits brouillons.

C'était étrange comme l'alcool lui était désagréable ce soir-là. Elle avait cette curieuse habitude de traîner sur les pontons après la fermeture des pubs, enveloppée dans son manteau en fausse fourrure blanche, les voiles de sa robe noire en mousseline valsant lentement sous le vent marin. Elle était longtemps restée accouder au bar, les yeux rivés sur les verres de cosmopolitans et de vodkas fraîches, contemplant la lente agonie de son spleen se débattant dans les flots rouges et cristallins, avant de concevoir que l’effervescence bien heureuse des poivrots ne lui était pas promise cette nuit. Elle était partie silencieusement, le claquement de ses talons sur le sol carrelé et sale étouffé par le brouhaha de la foule. A l’heure où les bars jetaient leur derniers ivrognes et que les effluves d’alcool poussaient les derniers résistants dans les bras de Morphée, ses nuits blanches prenaient des airs soudains de purgatoire, les volutes de fumée blanche s’échappant de sa bouche sanguine mutées en prières aphones, une longue complainte informe. L'alcool n'avait pas su chasser sa morosité. Quelle déception !

Assise sur le bois mouillé, elle balançait ses pieds au-dessus de l’eau noircie par la pénombre ; le talon de ses escarpins noirs effleurant parfois la surface liquide. Elle s'en voulait un peu, au fond : et si ses enfants étaient passés la voir ? Qu’elle avait été leur réaction lorsqu’il n’y eut pas de réponse aux trois coups portés à la porte de son appartement? Avaient-ils été déçus ? Est-ce qu’elle leur avait manqué ? Est-ce qu’ils lui en voudraient ? Et s’ils ne venaient plus jamais la voir ? Elle toussa. Et si elle avait un cancer des poumons ? Le problème de Tristan était qu’elle voyait beaucoup trop loin, et pas ce qui la guettait au coin de la rue. Elle passait toujours à côté des évidences et inventait de grands maux, des mots laids qui l’auraient dévoré un de ces jours. Elle jeta sa cigarette encore fumante à la mer. Il faudrait qu’elle arrête de fumer; ce serait affreux si son cancer des poumons évoluait en cancer généralisé. Elle alluma une autre cigarette, et balança sa tête en arrière dans un long soupir plaintif.

Elle regarda la barque miteuse et étroite amarrée quelques mètres à sa droite.
Tristan aurait voulu qu'on l'emmène. Pourquoi pas dans un pays tropical ? il faudrait un peu de soleil pour réchauffer ses ardeurs piégées dans le glacier de son indifférence.

Le craquement soudain du bois la sortit brutalement de sa rêverie dans un sursaut incontrôlé. Elle tourna vivement la tête, foudroyant l'intrus d'une oeillade agacée. Sous la lumière blafarde des lampadaires, elle reconnut la silhouette juvénile dont elle dessinait chaque soir les contours découpés par les persiennes sur le plexiglas de sa fenêtre. Son agacement laissa place à un vaste hébètement et une gêne incommensurable.

Vous m'avez fait peur, monsieur elle hésita monsieur... elle adopta l'air des gens qui ont l'air de réfléchir intensément Evans, oui, voilà. Evans. Lily Evans ? j'ai lu ça dans un des livres de mes enfants. C'est amusant. ça ne faisait rire qu'elle.

C'était déconcertant de le voir là, tout droit devant elle ; il était beaucoup plus grand qu'elle ne l'avait imaginé. On aurait dit que le petit homme roux qu'elle s'amusait à observer tapie dans l'ombre de son appartement avait soudainement jailli du tableau de la chambre d'en face et s'était incrusté dans sa réalité.
Elle tapota le bois humide et abîmé, une place imaginaire à ses côtés, l’invitant à la rejoindre « venez, venez ». Ce n’était pas dans ses habitudes, mais de toute manière quand on est soûl, rien ne nous semble vraiment extraordinaire.

Belle soirée, hein ?

C'était ironique.
Elle laissa s'échapper de sa bouche dont le rouge atténué relevait la blancheur de sa peau un long filet de fumée blanche. Elle tentait tant bien que mal de garder une certaine contenance, étouffant ses gestes maladroits dans la pénombre sibylline du port. Elle ne savait pas trop de quoi lui parler, si ce n'était que de lui conseiller de retirer ce ridicule cache-oeil. A quoi bon, après tout, dans ses délires soûlards, Tristan crut apercevoir l'ombre d'un grand pirate.

Vous aimez les contes de fée, Evans ? elle se recula un peu et jaugea d'un oeil torve son interlocuteur non, vous ne m'avez pas l'air d'un jeune homme friand des histoires de princesses prêtes à se faire culbuter dans le foin par le premier pecnot en collants qui passe. Peut-être les romans épiques ? de chevalerie ? comme Don Quichotte. elle s'arrêta quelques secondes vous savez lire, au moins ?

Elle se pencha un peu vers lui, attendant une réponse à sa question posée sur le ton le plus sérieux du monde. Elle l'avait croisé quelques fois dans les couloirs d'Aisling, et il lui semblait même avoir aperçu un bel après-midi Elizabeth Taylor, son affreux chat persan à l'odeur pestilentielle, ronronner aux pieds du jeune homme, ce qui était, avouons le, franchement surprenant. Madame ne l'avait jamais vu d'aussi près, c'en était troublant. Elle s’appesantit sur l'éclat de l'émeraude de son oeil, et la malice de son sourire. Peut-être le trouva-t-elle attendrissant. Il avait l'air un peu idiot, en fait.

ô ma folie ma belle fièvre, mène-moi sur d'affreuses grèves


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