Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilAccueil  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le Deal du moment :
Manga Chainsaw Man : où acheter le Tome 17 ...
Voir le deal
19.99 €

Partagez | 
 

 It's in the water baby ; Victoria.

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
▬▬▬▬▬▬▬
Ludvik A. Haraldson
It's in the water baby ; Victoria. Rangpsy
Ludvik A. Haraldson

Messages : 256
Date d'inscription : 18/06/2011
Age : 29


It's a kind of magic.
Age du personnage : 17
Nationalité: Islandaise
Relationship:

It's in the water baby ; Victoria. Vide
MessageSujet: It's in the water baby ; Victoria.   It's in the water baby ; Victoria. Icon_minitimeJeu 26 Juil - 21:55

it's between you and me.

Dans le silence monacal de cette bulle, sous les piliers sévères du sanctuaire, il y a des milliers de couleurs et de branchies poisseuses en ébullition.
Sous cette poche creusée dans le ventre de la terre, dans le gel obscur de la salle, les sons ne hurlent pas. Ils entrent dans les murs tendres sans s'entrechoquer, sans heurt, doucereux, et ils chuchotent pâteusement. Des murmures.

Ce sont des bancs entiers et des nuées qui fendent le ressac et on se croirait dans un autre espace. Tout est différent et tout se fait silence, liquide, sel peut-être, entre les doigts.
Perte de pesanteur. Perte d'équilibre. C'est peu à peu que l'eau s'élève en volutes, quitte son lit tranquille, pour s'infiltrer partout dans les membres, les membranes, les tissus osseux, les corps devenus spongieux.

Elle est insidieuse.

On croirait presque que la peau se décolle, imprégnée par les abysses. On croirait voir des spectacles donnés par des ondines. Et des hallucinations placides, des vols d'oiseaux qui sont des poissons, puisqu'ils n'ont pas d'ailes et qu'ils ondulent, vous passent au travers. Tout votre petit monde, tout votre univers est réduit à un local, un bocal, une boîte de formol, un cosmos aqueux qui vous aura envahi les bronches. Les algues vous auront poussé dans la trachée jusqu'aux narines. Vous devenez sirènes, harpies, puis hydres, puis léviathans ; monstres aux peaux croupies que vous voyez parfois, à travers la pupille vitreuse, dans les songes. Écailleux. Calleux. Les grands rêves lacustres. Vous pensez tomber du lit et vous noyer, n'est-ce pas ; c'est comme perdre pied et boire la tasse d'une traite ; vous ne reverrez plus la grève. Ce n'est plus merveilleux. C'est oppressant. C'est mourir dès qu'on traverse le couloir pour atteindre les vitrages de la salle sous-marine. C'est désespérer.

Ces jours-ci l'aquarium paraissait être un véritable musée des horreurs ; à chaque regard de Lie qui transperçait la paroi de verre une de ces créatures languides l'observait en retour. Au fond des veines il sentait le froid de l'eau meurtrière le remplir comme un naufragé.
C'étaient des yeux de poissons mous, ronds, inertes, des yeux-harpons, des billes dans les orbites de créatures qui rêvaient probablement de dévorer sa dépouille. Ils le voulaient au fond de leur cage immergée, bouffé par les planctons, ils voulaient becqueter dans ses entrailles et blanchir son squelette. Beaucoup de grands pirates ont fini comme ça. Beaucoup de grands bandits des siècles passés. C'était l'impression lancinante que ça lui faisait.
Il souriait de tant de rage muette dans le regard d'une murène.

❝— Et bien.

Ses yeux bleus s'accrochaient à ceux électriques de la bête. Il lui adressait toute sa compassion ; il aurait volontiers flatté son cou interminable et flasque.
Et dans le reflet que renvoyait la vitre, au loin, approchante, il voyait sa silhouette.

— Qu'est-ce que tu veux que je te dise.

Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Je t'ai vue. J'ai l'impression de te connaître. Comme si on avait passé mille ans ensemble, côte à côte, sans se toucher, dans cet aquarium.
On a déjà tout fait, et puis c'est bien, c'est sale, ça nous ressemble.

C'est du toi et moi tout craché, bâclé étalé. Ça a fini par terre. Bringuebalé, gueule-cassé. Du travail ni fait ni à faire, de la sale besogne, et en la matière c'est ce qui se fait de mieux ; toi et moi on le sait, toi et moi, moi et toi. On a jamais vu déchéance plus belle.

On est les spécialistes de notre propre perdition, parce qu'on sait ce qui fait celle des autres ; pour ça on a pas notre pareil. Nos sourires s'étirent dans ces dilatations terribles des muqueuses malades. C'est des lamentations plus que des exutoires ou bout des lèvres. C'est toute une histoire, ce sourire, toute une ligne à même la peau qui s'érige en crevasse, en dorsale sur le visage, c'est l'équateur de chair : c'est une fenêtre sur les dents et le dur qui explose en millions d'éclats. On a les sourires. On a les sourires, on a les phalanges qui saignent et on a le fil de la vie enchevêtré autour des doigts ; même ces salopes de Parques n'y pourront rien changer.

Il y a les âmes sœurs, les esprits qui se ressemblent, et qui se fondent l'un dans l'autre comme des jumeaux de cristal et de belles pierreries. Il y en a qui s'assemblent dans l'immaculé d'un cœur de neige. Mais nous c'est malsain, nous c'est dégueulasse, détrempé, filasse et dégoûtant, nous on s'emboîte pas on s'encroûte, c'est presque du sang dans du sang consacré, presque des viscères plongées dans le putréfié et le stupre et la sueur écrasante ; et par delà cette fonte et ces choses emboîtées, cette vraie fausse consanguinité, cette organique chute dans les bas-fonds de la misère corporelle, par-dessus les joyeuses hauteurs et les fondations branlantes de nos corps, par-dessus les vertiges éreintants dans nos têtes, après les sommets de nos misères confondues et plus haut, plus haut encore, il y a nous. Il y a nous, nous on respire le mensonge à plein nez.

Victoria c'est un joli prénom. C'est un prénom qui veut dire triomphe, j'ai gagné. C'est un prénom abrupt qui écrase sous la sècheresse macabre de la première consonne.
V.
Tu crois que je n'ai pas entendu parler de toi ? Toi et moi, ça pourrait faire nous.

Il y a nous debout sur le fer rouillé, il y a nous et nos regards assassins qui s'entrecroisent sans s'échanger, ces prunelles qui s'enfoncent en lames encore rondes. Lie le sent bien parce qu'il connaît trop ça : il y a le vice au fond des pupilles et puis au bord des lèvres, il y a nous, nous face à face, et on ne peut pas le supporter ; oh non, on peut pas, et alors nous, on s'effondre. Qu'est-ce qu'on peut faire de mieux ; il y a nous dont les puissances mutuelles s'annulent en se voyant et on s'effondre. Poussière, poussière, vide infini qui résonne dans les corps désaffectés.

Je te serais bien gré de me dire qui tu es, il aurait susurré en toute sincérité, avec son œil décapant qui lui fauche tête et cervelle dans un détour du regard. Un petit crochet par ses yeux, ses yeux longs comme des couteaux, ses yeux qui décortiquent, son intérêt en dilettante ; le temps de remettre ses cheveux en place, ses cheveux trop grands dans la salle trop bleue, ces longs cheveux de fille sur le crâne brutal d'un monstre, ces cheveux tirés qui luisent comme le goudron chaud et qui sentent comme le musc, cette toison idéale où glisse l'alizé brut et puis où coule l'oxygène qui filtre dans la violence muette du jeudi soir. Dis moi qui tu es, petite. Dis-moi pour qui tu te prends.

Une question. Un qui.
Ça ondule dans le silence, le long mugissement assourdissant du silence. Un noir incomplet car scindé par la mort. Le psychédélisme.
Qu'est-ce que ça fait tâche, les répliques de toxico philosophico-spirituel contre le vent.
Qu'est-ce que ça tiraille, au bout des lèvres, cette courtoisie de majordome qui lui faisait baisser le crâne et plisser le front. Qui lui ferait presque poser un genou à terre, par politesse acide.

— Mademoiselle Donovan, vous venez faire quoi par ici ?

Parce que moi je ne sais pas ; moi, à part te faire face et être là, à part camper sur mes deux jambes qui vacillent dans la pénible pénombre et sur la cadence de ton être, à part être un petit morceau, une petite veine contractée de ton ventricule, un petit bout de toi hors de toi, à part être à tes côtés et me dresser en obstacle comme un colosse aux pieds d'argile, moi, à part être plus perdu encore que si j'avais été laissé pour mort, dans un désert ou au bout d'une route anonyme, et puis à part être là avec toi, toi stone et assommée par on ne savait pas vraiment quoi - ni vents qui battent le roc ni apocalypses -, à part être là et te sourire profondément, moi, j'ai aucune idée qui se balade dans ma tête. J'ai aucune idée d'où est mon âme.
Je sais que je te connais. On m'a parlé de toi. Peut-être qu'on t'a parlé de moi ?

Lie vibre. Lie sent sa peau se réchauffer - et se tordre, se tendre - mollement, dans l'étroitesse des os.
Lie se demande si on ne l'a pas drogué. Préférer une route, une presque-inconnue à son âme, ça ne lui avait jamais ressemblé.
Il préfère rompre d'un coup le rythme de sa voix éraillée.

— Hé Donovan, tu veux une cigarette ?

Il plonge une main dans sa poche. Le cliquetis sourd de la rouleuse. Un petit tube de tabac porté à ses lèvres, un autre qu'il approche de celles de Victoria, plus rondes, plus filles ; un geste cassé, cassant, tactique.
Un geste.

Revenir en haut Aller en bas
▬▬▬▬▬▬▬
Victoria N. Donovan
It's in the water baby ; Victoria. Rangpsy
Victoria N. Donovan

Messages : 517
Date d'inscription : 19/11/2011
Age : 32


It's a kind of magic.
Age du personnage : 18 ans
Nationalité: anglaise
Relationship:

It's in the water baby ; Victoria. Vide
MessageSujet: Re: It's in the water baby ; Victoria.   It's in the water baby ; Victoria. Icon_minitimeVen 27 Juil - 22:39



Cette ironie qui rend tout moins amer. Dans la pénombre des escaliers, elle s'enfonce avec régularité. Cet aquarium, comme un maquette animée du petit monde là-haut. Il y avait, derrière ses vitres, tout un tas de petits poissons rusés. Certains avaient tes manières, d'autres tes attitudes mais, Noctis Ô Noctis, aucun de ceux-là n'avait ton charisme. D'un pas leste, ton sourire chargé menace sournoisement les petits spécimens qui s'aventurent près de la parois. Tu ne leurs accordes pas un regard. Il faut qu'ils te voient, mais aucun d'eux ne mérite ton attention. En revanche, cet insigne honneur sied bien mieux à cette aura, au loin.

Elle redresse la tête comme si son nom eut été prononcé. Son oreille ne perçoit rien et pourtant, persiste l'intime conviction que de là-bas quelque chose l'appelle... Son pas s'accélère imperceptiblement, régulièrement, et elle file le long du couloir, ne s'arrêtant que face à son dos. Elle aurait pu garder cette distance qui la caractérise, cette sécurité qui lui ressemble, si elle avait vu. Mais ce ne sont pas ses yeux qui l'ont guidé jusqu'ici.

Immobile, ses paupières capitulent lentement, lourdement, sa tête s'incline dans le sacro-saint respect d'une révérence muette. Elle aime à se laisser aller à la vulgarité de cette atmosphère, apaisante, si familière. Il n'est pas question de famille au sens strict du terme, cette notion qui lui échappe, par désintérêt total. Le clan, voilà un mot qui lui parle davantage. Car dans la délicatesse du velours tendu, dans la tendresse du bois noble, dans la subtilité d'une dorure ouvragée, au cœur même de tout cet étalage, glorieux représentant de la fine fleur de la civilisation, de toute sa force et sa richesse, ce trésor d’habilité, d'ingéniosité et de connaissance, se niche une trivialité sans borne, une sauvagerie, une animalité sans pareil. Le Clan. Une loyauté traîtresse les rassemble, les uns engendrés par les autres. Ils ne se doivent rien ; ils se guettent entre eux, prêt à se sauter à la gorge au moindre faux pas. Il n'y a pas de famille, il n'y a ni chaleur, ni confort, ni mièvrerie d'amour, de soleil qui brille et d'oiseaux qui chantent. Il n'y a qu'un clan, qu'une fierté commune, un rapport distant qui pourtant trouve sa source au plus profond des cœurs, dans les replis crasseux de l'âme. Il n'y a jamais vraiment eu de famille, ou peut-être qu'elle ne se souvient plus. Elle n'aime pas conserver en mémoire les événements inutiles ; on ne gaspille pas d'espace-disque, pas pour si peu. Et s'il n'y a jamais vraiment eu de famille, alors il ne s'agit pas vraiment de familiarité. Il n'est pas question de famille au sens strict du terme, plutôt d'un écho de ce qui se trouve en elle-même. La résonance d'âmes qui ne cherchent ni à se contacter ni à se répondre. La collision involontaire de deux espaces-temps qui se croisent. Parce que l'être humain est ce qu'il est, et que même le plus infâme d'entre eux ne peut lutter contre ça...
On court après quelque chose.

Souillés. Salis. Abîmés. Masochistes. Vous vous faites du mal, et si bien, qui d'autre pourrait comprendre ? Volontaires devant l'éternel, prêts à se faire charcuter au nom de rien. Mais toi, Noctis, tu en es fière. C'est pour la bonne cause -en considérant, bien sûr, que la seule cause qui vaille d'être défendue est la tienne. Tu œuvres pour toi, rien que pour toi, et tu en payes le prix. Ton âme est souillée, tes mains salies, ton cœur abîmé. Tes yeux masochistes. Ils se posent sur tout avec indifférence et n'en retirent que la laideur. Tu te nourris de laideur, Noctis, comment aurait-il pu en être autrement ? On ne sort pas indemne de ce repas là. Et, repue, tu essuies machinalement un menton tâché de sang. Tu manges vraiment salement, Noctis. Et tu es si fière. Tes yeux, tes yeux avides, des yeux de biches parés de longs cils, comme des mâchoires qui broient le cœur des hommes. Tu es le requin, Noctis, au sein de cet océan privé. Ce requin-là, ce requin familier, le longimane, le nomment-ils. Comme lui tu feins de n'être rien, il agite ses ailerons blancs et tu véhicules de doux sourires embarrassés. Des leurres, seulement des leurres. Puis tes yeux les mangent. Lorsque tu rouvres les paupières, ils sont pris au piège. Mais pour les tiens, Noctis, pour les gens comme toi, ces battements ne sont que douces étreintes. Tu es fière, fière de toi, fière de ce que tu es comme de ce que tu fais, fière de la moindre de tes entreprises, fière même des moindres échecs qui engendrent toujours de sanglantes contre-attaques, mais tu ne lui en voudras pas. Tu ne lui en voudras pas de ne pas être glamour. Tu fermes les yeux, tu pries, tu pardonnes. Tu lui accordes l'absolution. Tes yeux en disent long...

Et pour cela, jolie Noctis, une partie de toi souhaite enlacer ses épaules noueuses et murmurer à son oreille. Cet écho te rend féline. Tu ne parles pas de confiance. La confiance ce n'est ni un sentiment ni une sensation. Ce peut être de l'argent, éventuellement. Le reste du temps, c'est de la bêtise, comme tant d'autres comportements humains. Vous n'êtes pas vraiment humains. Vous venez de clans. Vous n'êtes que des animaux. Alors tu ne lui en veut pas de ne pas être glamour, de ne pas être mieux déguisé. S'il veut être pourchassé par le berger, c'est son choix. Il te rend même service, il détourne l'attention. De toi, du loup caché parmi les moutons...
Ça te rend reconnaissante, au fond.

Tu appréhendes tes iris trop explicites dans le reflet et vires brutalement ce regard criant vers le décor. Tu l'envoies se perdre dans cette immensité, ce petit miracle de technologie -voire même de magie- qui maintient cette dimension sortie de nulle part, probablement pas vraiment là alors que tu te tiens vraisemblablement ailleurs, et tu t'y perds aussi. Les muscles de ton visage se détendent et ton sourire fond. Tu ne te sens pas obligé. Tu avais juste envie. Il méritait un peu de ton sourire, en bien comme en mal. Caressant et blessant. On te sait à double tranchant...

Mais sa présence t'intrigue, finalement, comme le reste de sa personne. Comme surprise de trouver ici un morceau de soit, comme quelque chose qu'on aurait fait tomber il y a longtemps et que l'on retrouverait là. Et, comme maintenu à ton visage par un élastique, ton sourire loin dans l'océan te revient lentement sur les lèvres, si fort. Trop fort. Tu ne contiens plus le muscle et l'ourlet de chair s'étire, dévoilant une canine. Tu le contiens, tu peux le contenir. Tu le sais trop révélateur, ce foutu sourire, et tu le gardes pour toi. Il fait peur. Mais pas à lui. Ce n'est pas gênant. Tu ne le retiens plus. Tu laisses tes pupilles s'aiguiser sur sa nuque jusqu'à ce qu'il te dévoile le détail du reflet morne que tu apercevais par dessus son épaule.

On court tous après quelque chose. Tu le rencontres, et ça y ressemble. On se cherche, on se court après, trop occupé en soi-même pour faire cas du reste du monde. Tu pensais t'être trouvée, il y a longtemps. Tu ne l'avais même pas vu, cette petite fissure : il manquait un éclat. Cet éclat brille au sol, devant toi. Il s'adresse à toi comme un greffon rebelle, comme un esclave répond à son maître par cette fausse servitude emplie de haine. Il en est conscient, et il t'emmerde. Il ne se laissera pas assimiler. Il ne viendra pas combler la fissure. Il ne sera pas un de tes organes, il ne laissera pas ton sang le traverser de part en part, il ne jouera pas son rôle dans ton organisme. Du moins, pas de son plein gré...

Il semble hanter ce lieu, au fond. Son obscure présence dans ce faux endroit. Sa haine draguant la tienne. Tu ne savais pas qu'il se trouvait là. Mais tu es peut-être bien venue le chercher. Il te questionne. Tu te serais empressée de répondre, autrefois, mais il semble abolir la moindre de tes habitudes. Une question appelle une réponse. On renseigne toujours le client. Lui donner l'impression qu'il a toutes les cartes en main reste le meilleur moyen de le prendre au piège. Mais à quoi bon se piéger soit même ? Tu le laisses attendre. Il n'a pas besoin de savoir. Il n'y a même pas vraiment de réponse. S'il y avait une raison à ta venue ici, elle s'est perdue dans ses yeux. Et si rien ne t'écarte de sa présence, tu pourras aussi bien oublier les dix dernières heures, le couleur du ciel ou même ton nom.

Mais alors même que tu te vides de toute ta substance, il rompt cet instant d'intense introspection par une nouvelle trivialité. Décidément pas glamour... Ton regard épris descend sur cette main qui approche et la toise avec mépris. Ton orgueil. Trop irrévérencieux... Ton sourire, comme le soleil perce à travers les nuages, soulève le coin gauche de ta bouche amère et, te décalant de la trajectoire de la substance nuisible, tu bascules la tête et laisses échapper tes premiers mots.

▬ Tu mourras avant moi.

Une vraie preuve d'intimité. Comme des mots d'amour... Aussitôt dit, elle s’esquive d'un pas sur la droite et s'avance rapidement jusqu'à la parois, scrutant l'eau translucide et ses habitants médiocres. Elle a comme inversé les rôles. Elle n'a pas joué le jeu, ou bien elle provoque simplement. Elle n'y a pas vraiment réfléchit. Ses pensées sont parasitées par le reflet qu'elle perçoit. Elle l'observe, dos à elle, par dessus son épaule.

Tu es plutôt satisfaite qu'il t'ait donné une occasion de faire ce premier pas, Noctis. La danse vient tout juste de commencer. Mais cette fois, les pas ne sont plus les mêmes... Car il n'est pas glamour, il ne se donne pas cette peine. Toute forme d'addiction est une faiblesse -en cela, tu te gardes bien de considérer ton obsession malsaine pour le prince des psychiques. Il ne le verra pas ainsi, mais dans ton esprit pavé d'opinions fondés et d'avis tranchés, il vient de te laisser l'avantage. Il fume. Tu ne touches pas à ces choses-là. Il n'y a pas de valeur moral derrière ton jugement, rien que de la logique, du scientifique, de la certitude finie. Il a besoin de quelque chose et tu n'as besoin de rien. Toute ta carrière est construite sur le besoin. S'il a besoin de quelque chose, il a besoin de toi. Ils ont tous besoin de toi. Tu es leur besoin à tous, leur besoin commun. Oui, il a besoin de toi, et cette idée te plaît sauvagement. Ton pouls s'accélère et tu souris à la parois...


Revenir en haut Aller en bas
▬▬▬▬▬▬▬
Ludvik A. Haraldson
It's in the water baby ; Victoria. Rangpsy
Ludvik A. Haraldson

Messages : 256
Date d'inscription : 18/06/2011
Age : 29


It's a kind of magic.
Age du personnage : 17
Nationalité: Islandaise
Relationship:

It's in the water baby ; Victoria. Vide
MessageSujet: Re: It's in the water baby ; Victoria.   It's in the water baby ; Victoria. Icon_minitimeJeu 27 Déc - 22:35

parce qu'il est too mainstream d'être en temps
(et en qualité)

it's in your frequency.

Processions de poissons aux couleurs indélébiles. Ça ruisselle dans ses yeux. Toutes les couches se diluent, bleues, oranges, vertes, vermillon, en surface ou dans les profondeurs nébuleuses. C'est épars et liquide entre les doigts serrés. Des phalanges s'entrouvrent pour laisser passer.

Il y a des reflets dans ses cheveux et des bancs de pèlerins à nageoires lui traversent le regard. Il a l'air serein, et sa poitrine lente, dans le doux cahotement des poumons, du thorax, des cages oxygénées, ne se soulève pas. Parce qu'il ne se passe rien. Il ne pense rien d'elle. Ce n'est pas de la morgue. Ce n'est pas de la superbe. Il ne pense rien.

Le vide martèle la pièce.

De l'autre côté, dans les nappes d'eau salée avec les anémones qui se contractent doucement, comme des poings, un requin surine sa proie. Déchiquète, étête, du bout des crocs, répète. Répète l'opération. Arête sur le billard. Scalp des branchies ouvertes.
C'est comme ça qu'on survit dans les eaux troubles, et tout le monde le sait, les alevins sont cruels.

Il retourne la cigarette entre ses paumes sans la blesser et porte l'extrémité blanche sur la lippe supérieure. Humidification.
Les peaux spongieuses suintent. Sous la lourdeur des mâchoires qui tombent, très martiales, très glaciales, la chair blanche cède. Les arêtes s'écartent. Les algues crissent. Les queues se croisent. C'est un peu comme sur terre, mais dans la froide lenteur, les abysses du silence, l'absence étonnante de gravité. Est-ce que les poissons saignent ? Dis-moi.
Et puis vois. Un charmant spectacle.

Il était en suspens. Sa tête était vaste et poreuse, un globe de verre, un cosmos immergé et un petit étang aux eaux stagnantes où la cervelle macérait dans les idées bleues.
Dans la lagune de ses pensées, il y avait des paroles échouées comme des navires. Elles ne reprendraient plus jamais le large. Noyées, et puis oubliées, glissées dans des bouteilles à la dérive, elles s'étaient cassées en petits bouts sur les brisants et c'était une belle fin. Parmi ces paroles en naufrage il y avait la voix fluette et onduleuse de cette fille étrange.
Ludvik n'écouta que d'un tympan ce que lui répliqua la bouche de Mademoiselle Donovan.

Il tiqua doucement de l'oeil droit, du sourcil gauche ; pris de ces minuscules gestes à fleur de peau, et sans odeur, et sans impact, et si cliniques qu'on ne les voit pas.
Il parait que t'as pas vu battre ses cils, Victoria ?
Une murène passe et cache le pli de ses yeux. Un passage. Un cri sirène qui se perd sous une vague. Cœur de requin battant.

C'est utérin, cet univers. C'est un petit espace concave et tout se mélange, poisseusement, dans les lugubres tourbillons ; oxygène, hydrogène, CO2, H2o, dis-moi, tu sais où tes poumons se situent, tu sais si tu perds pas bientôt pieds, combien de miles, combien de nœuds, dis ; tu as tâté les deux coins de ta gorge blanche pour voir si n'y ont pas poussé des branchies ?
C'est pas pour te faire peur.
C'est juste par précaution.

Respire fort. Expire.
Le petit espace de chair entre le nez et la bouche se gonfle sous la pression et des bulles crèvent en sortant.
Je crois avoir quelque chose à te dire, je crois que ce n'est pas très important, pas très viscéral, je crois que tu t'es trompée.
En fait, tu n'es pas quelqu'un d'intéressant.

Il fait comme s'il tirait une longue taffe de la cigarette qu'il n'a pas allumée. Le seul feu qui brillait crépitait dans sa bouche, entre les lèvres où mourait pour de faux la blonde sans filtre.

— Je mourrai avant toi, il répète. Voix comme pleine d'une soudaine réflexion.

La tête vacille dans un imperceptible mouvement. Les paupières s'écrasent, lasses, bridées par ce qui doit être une consternation profonde, un immense épuisement mental.

— Tu parles de mon précoce cancer des poumons ? D'un tragique accident de plongée sous-marine ? D'une noyade au large des côtes. Peut-être d'une attaque meurtrière de requin ? Les dents claquent comme des pièges à loup sur la dernière syllabe.

Il s'appuie, dans le silence subaquatique, sur le double vitrage de l'aquarium. Une rascasse errante se traine derrière lui et on aurait juré un linceul de rouge et de noir, un fanion déchiré dans la nuit, un petit bout d'âme endormie qui drapée par les eaux et gonflée par les courants s'enfuit. Vers de plus grands espaces, de grands vaisseaux fantômes, en conquête sur les tristes tropiques. Image morbide. Ça a ce goût salin sali.

Et puis soudain tout s'arrête.

— Conneries.

Et puis soudain il hausse la voix.
L'apesanteur s'appesantit.

Le mégot s'échappe de sa bouche et tombe au sol avec un fracas qui n'a pas lieu d'être, un fracas abyssal de mine sous une jambe, d'artère qui éclate ; et c'est absolument terrifiant.

Le sang froid des poissons s'arrête de fluctuer dans les écailles.

La rascasse en panique se love sous un parvis de corail.

Le mégot roule, explose sous le talon islandais, saigne des rafales de cendres.
Et son regard-scalpel se plante juste dans les yeux adverses, assez proche pour faire mal, pas assez pour tuer.

— Donc c'est ça que t'es venue partager Donovan, tes petites conneries ?

C'est mon temps que t'es venu perdre, ma langue que t'es venu pendre, mon cœur que t'es venue battre avec tes beaux cheveux et tes beaux grands airs de conne ?

Il sentait battre dans sa tempe un pouls qui ne lui appartenait pas. Il n'était pas excité et pas en colère. Il était en suspens.

Et puis la voix caverneuse s'arrête de faire trembler le verre, de zébrer les parois, Ludvik l'esthète laisse retomber le timbre sépulcral au fond de sa gorge. Et pourtant les échos filent encore à travers l'eau.

Elle est devenue noire.

Pleine de remous laids qui s'écrasent sur les vitres et les teignent de mort monochromatique.

À la surface de l'aquarium, là où l'aération gluante d'une substance dégueulasse gémit comme un enfant qu'on démembre, un ossuaire de cent cinquante poissons crevés. Trépassés là-haut. Comme par les souffles mortuaires de Poseidon. Une condamnation de mille lieues sous les mers.
Ils flottent.

Les cadavres flottent la bouche grande ouverte, les nageoires pourries ; les yeux sirupeux ont éclaté. Plus d'eau, du pétrole.

Pétrole partout autour d'eux qui les enveloppait de sa houppelande. Douces toxines. Et beau mazout raffiné. Et mort douce par invisible strangulation de la noire houppelande.

Quelque minutes plus tôt, Ludvik avait pris soin de maudire le haut-lieu.

— Maintenant que nous sommes enfermés dans un cimetière, une belle catastrophe naturelle, tu vas pouvoir m'épargner tes répliques de comptoir et me parler de toi.

Parce que le noir te va si bien au teint, parce que c'est le genre de manteau de nuit qui te convient, parce que t'es plus crasseuse encore que ce kérosène qui étouffe la jolie salle dans une poigne d'enfer. Un petit requin, retourné sur le dos, l'aileron inerte, la gueule béante, l'évent suintant d'écarlate qui s'empêtre dans l'huile toxique, remonte vers les grands sacrifiés. De belles écrevisses, rongées dans les entrailles, se convulsent jusqu'à éclater.
Et alors l'obscurité les avala.
Disparition sous les trombes. Et puis rictus satisfait du bourreau qui n'a plus un mot à la bouche.

Pas qu'il y ait encore à dire.

Il aurait volontiers plongé les mains dans le bocal de poison et de sang pour se faire une couronne d'algues décédées, d'arêtes séchées, mais il préférait garder ses doigts propres pour attraper les longs cheveux de Victoria à la racine quand l'occasion se présenterai.

Pour les arracher.

C'était là un peu toucher la pire des grâces.

Revenir en haut Aller en bas
▬▬▬▬▬▬▬
Contenu sponsorisé



It's in the water baby ; Victoria. Vide
MessageSujet: Re: It's in the water baby ; Victoria.   It's in the water baby ; Victoria. Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 

It's in the water baby ; Victoria.

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
 :: « CAMPUS. :: « Laboratoire. :: « Aquarium d'EPS des PSY.-
Créer un forum | ©phpBB | Forum gratuit d'entraide | Signaler un abus | Forum gratuit